Déclaration d’Entrée du Centre Coordonné d’Observation de la Sécurité Électorale des Femmes (COSEF)

En prélude eu second de la présidentielle, le COSEF dans une déclaration rendue public ce vendredi 19 février 2021, a appelé les différentes parties prenantes à ce scrutin à cultiver un esprit de paix, de tolérance tout au long du processus.   

I. CONTEXTE DU SECOND TOUR DE LA PRESIDENTIELLE

Le second tour de la présidentielle au Niger, prévue pour le dimanche 21 février 2021, opposera Mohamed Bazoum et Mahamane Ousmane, arrivés respectivement premier et deuxième  à l’issue du scrutin du 27 décembre 2020. Comparativement au contexte qui prévalait pendant le premier tour, cette élection se prépare dans un climat relativement calme, avec toutefois des violences verbales observées notamment sur les réseaux sociaux. Il est également   fortement marqué par le jeu des alliances et ralliements des partis politiques et candidats. 

  • Sur le plan sécuritaire et sanitaire

Le Niger, à l’instar des autres pays du Sahel, continue de faire face à la menace terroriste. Le 2 janvier 2021, deux villages situés à quelques kilomètres de la frontière avec le Mali, dans la région de Tillabéri, furent attaqués par des groupes terroristes. Au bilan, 100 civils tués, en majorité des hommes. Cette attaque qualifiée de ‘’plus meurtrière’’ contre des populations civiles, a occasionné le déplacement massif des personnes vers des zones dites ‘’sécurisées’’, exacerbant ainsi les conditions précaires et humanitaires de ces populations dont des femmes.

A cela, s’ajoutent les défis sanitaires liés à la seconde vague et nouveaux variants de la pandémie de la COVID-19 qui sévissent dans la région.

Ces différents facteurs d’insécurité pourraient susciter des sentiments de peur et jouer sur le taux de participation des électeurs et électrices, particulièrement dans les zones à risques.

  • Au titre de la liste électorale et des cartes d’électeurs

Conformément au code électoral Nigérien (article 46, alinéa 3), le fichier électoral audité et remis officiellement aux autorités nationales le 11 septembre 2020, ayant établi la liste définitive de 7 446 556 électeurs-trices dont 55% de femmes, avec un découpage électoral de 25 978 bureaux de vote, reste en vigueur pour le second tour.

  • Au titre des Candidatures

Deux candidats restent dans la course au fauteuil présidentiel pour le second tour: le candidat du PNDS Tarayya, Mohamed Bazoum, du parti au pouvoir avec 39,30% des suffrages exprimés au premier tour et l’opposant  Mahamane Ousmane, candidat de la RDR Tchanji, arrivé en deuxième position avec 16,98% des voix.

  • Au titre de la campagne électorale

La campagne électorale du 2nd tour de la présidentielle a été  ouverte le 3 janvier 2021 et a pris fin le 19 février à minuit (00h00). Elle se déroule certes dans un climat  relativement apaisé, mais avec des enjeux déterminants pour chaque candidat et ses alliés. Les femmes sont très actives au sein de ces formations politiques, servant dans la plupart du temps comme mobilisatrices des millitants à la base.

II. DE LA CONTRIBUTION DES ORGANISATIONS DE FEMMES

Les femmes Nigériennes, continuent de démontrer leur volonté et capacité à contribuer au renforcement de la gouvernance démocratique de leur pays, à travers une participation active à toutes les étapes du processus électoral en cours. L’une des principales plateformes regroupant des organisations féminines pour la promotion de la participation de la femme à la gouvernance politique  et aux processus électoraux est la Coalition Nationale des Femmes (CNF).

Elle a entre autres :

•   Mis en place un comité de réflexion sur les  perspectives ;

• Procédé à la vulgarisation du Code Electoral et de la loi sur le quota ;

• Organisé des rencontres d’échanges avec les institutions en charge de l’organisation des élections et les acteurs politiques pour des élections apaisées ;

A cela s’ajoute, Le plaidoyer pour l’application effective de la loi sur le quota et la participation politique des femmes ainsi que  l’appel pour des élections apaisées mené par plusieurs  organisations féminines nigériennes.

Toutes ces actions concourent au renforcement du processus électoral et à la participation citoyenne des femmes.

  • De la contribution de WANEP

Afin de contribuer à l’atténuation de la violence électorale de façon générale et en particulier des violences basées sur le genre dans le contexte électoral, WANEP-Niger avec l’appui financier de ses partenaires a poursuivi l’exécution des deux projets clés suivants:

– Le projet régional « Suivi, analyse et atténuation de la violence électorale » financé par l’Union Européenne, Délégation Régionale de Dakar, mis en œuvre de façon tournante dans 11 pays de la CEDEAO dont le Niger ;

– Le projet régional « Bâtir une approche inclusive de relance post-COVID-19 de sortie de crise et de réforme de la gouvernance au Sahel et en Côte d’Ivoire », financé par le PNUD Afrique et mis en œuvre en partenariat avec la CEDEAO.

Dans la mise en œuvre de ces projets WANEP-Niger a renforcé ces actions dans le cadre des initiatives suivantes :

– Le Groupe National de Réponses électorales chargé d’analyser les rapports de suivi, d’identifier les défis urgents et d’y apporter des réponses ;

– La Coalition Nationale des Femmes (CNF) dont le rôle essentiel est de promouvoir la participation politique des femmes;

– La diffusion de messages audio-visuels afin de sensibiliser les populations et particulièrement les femmes pour une participation active au processus électoral ;

– Le  Centre Coordonné d’Observation de la Sécurité Electorale des Femmes (COSEF) qui vise à renforcer la participation des femmes aux processus électoraux et à la réduction de la violence électorale ;

Le COSEF est une cellule de veille électorale organisée en trois (3) chambres que sont :

La chambre de collecte de données, assurant le contact permanent avec les deux cents (200) observatrices déployées à travers le pays pour relayer à la coordination du COSEF, les informations relatives au déroulement du scrutin avec focus genre ;

La chambre d’analyse, en charge de l’analyse des données désagrégées par genre et de la formulation de recommandations/réponses en vue de l’atténuation des risques identifiés avec un accent particulier sur les aspects genre ; 

  • La chambre de décision et de réponses aux risques qui regroupe des personnalités influentes, capables de mettre à profit leurs compétences, expériences pour obtenir des réponses positives aux menaces identifiées et de formuler des recommandations pour une participation active des femmes dans les processus électoraux et la gouvernance.

Les trois chambres sont appuyées par une cellule de communication. Deux (2) numéros verts (99 94 11 91 et 80 08 88 66) sont à la disposition du public pour permettre aux populations de signaler les cas de violence en vue de contribuer à leur atténuation pour le renforcement de la sécurité électorale de tous en général et celle des femmes en particulier.

III. MOTIFS DE SATISFACTION  DEFIS ET RECOMMANDATIONS

En termes de satisfaction, le COSEF note: 

– La tenue dans un climat apaisé du 1er tour de l’ élection présidentielle;

– L’implication plus accrue  des femmes dans le processus électoral;

– La participation d’au moins 27% d’observatrices dans les missions d’observation électorales internationales, régionales et nationales dans les 1560 bureaux de vote visités lors des scrutins du 27 décembre 2020;

– L’introduction de fiche destinée à la prise en compte de données désagrégées par sexe ;

– Le déroulement d’une campagne électorale sans violences majeures et l’engagement continu de la société civile notamment des organisations féminines, dans la promotion de la paix et de la cohésion sociale.

Aux motifs des défis

Certaines préoccupations demeurent bien que la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) ait donné des garanties pour une élection inclusive et transparente, dans un climat sécurisé:

 La faible participation des populations notamment des femmes dans les zones à risques de violences ;

 Le risque élevé de violence et contestation des résultats;

 Le relâchement dans l’application des mesures barrières liées au COVID 19 pouvant générer une nouvelle vague de contamination.

IV. RECOMMANDATIONS

Au regard de ce qui précède et en vue d’assurer un processus électoral paisible et inclusif, le COSEF fait les recommandations suivantes :

Au Gouvernement 

– Continuer de respecter le caractère indépendant de la CENI

A la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI)

– Mettre à la disposition des bureaux de vote, le matériel électoral à temps et en quantité suffisante ;

– Prendre des dispositions nécessaires afin de répondre aux cas de dysfonctionnements et/ou irrégularités qui seront reportés sur le terrain avant, pendant et après l’opération de vote ;

– Agir avec impartialité et dans le strict respect des lois électorales ;

– Désagréger les données par genre pour mieux apprécier la participation des femmes et des hommes au processus électoral ;

– S’assurer que, dans tous les bureaux de vote, les dispositifs de lavage des mains et de respect des mesures barrières sont en place et appliqués ;

– Prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’intégrité du vote et l’assistance aux personnes vulnérables.

Aux partis politiques et candidats

– Privilégier  le recours aux voies légales pour tout contentieux électoral;

– Prôner la non-violence dans les discours politiques et les réseaux sociaux;

– Renforcer la mobilisation des femmes dans la participation au scrutin ;

– Observer les dispositions du code de bonne conduite des partis politiques.

Aux forces de défense et de sécurité

– Maintenir l’ordre dans le cadre légal et le strict respect des droits de l’homme et de l’intégrité du vote ;

– Veiller à la protection des citoyens notamment  des femmes;

– Continuer à agir de façon professionnelle sur le terrain et respecter l’utilisation exclusive du matériel conventionnel lors des opérations de maintien d’ordre.

Aux organisations de la société civile

– Continuer la sensibilisation des parties prenantes  à la paix et à la tolérance ;

– Poursuivre la veille, l’alerte et le suivi du processus électoral;

– Prendre des dispositions nécessaires pour informer la CENI des irrégularités observées sur le terrain avant, pendant et après l’opération de vote.

A la presse nationale et internationale :

– Respecter l’éthique et la déontologie du métier de journalisme ;

– Faire preuve de professionnalisme en vérifiant la source de l’information avant diffusion;

– S’abstenir de diffuser, durant tout le processus, toute information susceptible de generer des tensions  en refusant de relayer les propos qui incitent à la violence.

– Promouvoir la perspective genre dans le rapportage et la diffusion des informations à toutes les étapes du processus électoral

Aux femmes et hommes leaders religieux et coutumiers :

– Continuer à prêcher la paix et la cohésion sociale durant tout le processus électoral.

Aux populations

 De cultiver un esprit de paix de tolérance et de cohésion sociale tout le long du processus

Fait à Niamey le 19 février 2021,

Le Centre Coordonné d’Observation de la Sécurité Electorale des Femmes (COSEF)